Installé à Angers depuis douze ans, David Torton - alias Koulou - vient de publier Drulls et Dralas, le deuxième tome du monde de Titus, une BD qui fait rimer mythologie avec psychologie.
Portrait
Sur la table du salon gît un sabre en carton. Sert-il de modèle aux scènes de combat de Titus, dessinées par David Torton, alias Koulou ? « Pas du tout, sourit l'intéressé, aux allures d'échassier rêveur. C'est pour que mon neveu, Armel, joue avec. » Armel est sagement assis dans le salon de cet appartement angevin, le feutre à la main. Il dessine des guerriers avec application.
Chez les Koulou ¯ pardon les Torton ¯ le dessin est une affaire de famille. Jean Torton, qui signe aussi Jeronaton, est un illustrateur reconnu, spécialisé dans les récits historiques, qui a fait ses classes dans les Studios Hergé. « Adolescent, je passais des journées entières à le regarder travailler, témoigne David, son fils. Il me corrigeait et il m'aidait. »
Des cours du soir à l'Académie des Beaux-arts de Bruxelles permettent d'affiner sa technique. « Après, pendant quatre ans, j'ai fait des petits boulots à Paris », poursuit Koulou, aux doigts longs comme des pinceaux. Il faudra la rencontre avec sa femme, voici 20 ans, pour se rendre à l'évidence : il sera lui aussi auteur de BD. Il est influencé par la saga de la guerre des étoiles, « un drame oedipien formidable, avec une dimension mythologique » qui vont trouver un écho dans son oeuvre.
La patience d'un guerrier Jedi
« Je travaille sur l'humain. Je m'intéresse à la psychologie, la psychanalyse et la spiritualité, à condition qu'elle n'enferme personne dans ses croyances », définit-il. De sa voix feutrée, il insiste sur les messages qu'il veut faire passer dans une BD « qui n'est pas réduite à une simple aventure ». Tant mieux si cette aventure attire les plus jeunes lecteurs. Leurs parents, eux, trouvent matière à réflexion dans un récit rempli de métaphores ¯ la grossesse, dans le tome I de Titus ¯ et de symboliques ¯ le voyage initiatique dans le tome II.
Avec la patience d'un guerrier Jedi, Koulou aura attendu de longues années pour imposer son style. « Pendant dix ans, j'ai fait des petites BD dans un journal protestant ; je me suis familiarisé avec les styles, les outils, les techniques. Je n'aurai jamais pu sortir un album correct avant. »
Il lui faudra dix ans de plus pour publier son premier album du monde de Titus, l'île aux tortues. Vendu à 3 000 exemplaires, il lui ouvre les portes d'un deuxième opus, Drulls et Dralas, sorti voici un mois. Avec ses héros aux idées et aux têtes bien carrées. « Quand j'ai cessé d'arrondir mes personnages, j'ai enfin trouvé mon style », revendique-t-il, le regard curieux cerclé par de grandes lunettes. Le langage, aussi, est particulier avec des néologismes « facilement identifiables », comme « verber » pour parler.
Autant d'astuces pour « entrer dans une intimité avec les personnages », comme le revendique l'auteur angevin, qui prépare déjà un tome III des aventures de Titus. Pour le plus grand plaisir de son neveu Armel.
Le monde de Titus II, Drulls et Dralas, Grrr... art éditions. 48 pages, 10 €
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Laurent BEAUVALLET.